Aujourd’hui, il ne se passe rien. Évitez les offres cosmétiques, les fleurs et la dé(sin)formation commerciale en restant au chaud, et partez plutôt à la rencontre des femmes, des vraies.
Il fut un temps où c’était moi qui savait tout ce qui se passait ce jour-là. Et pour cause : frustrée du manque d’information, j’avais finalement initié un site chargé de collecter et diffuser les annonces d’événements autour de la Journée Internationale des Femmes.
Cinq années plus tard, je suis larguée. Et à nouveau frustrée. Effarée, aussi, de la facilité et de la rapidité avec lesquelles je suis redevenue comme tout le monde, immergée dans le brouillard de la vie ordinaire, que le féminisme n’atteint pas.
Alors, je tire la manche aux copines féministes pour savoir : « Hééé, c’est bientôt le 8 mars... qu’est-ce qui se prépare ? » L’une s’est désinvestie, l’autre me parle de « découragement » tandis que la troisième me répond : « Je crois qu’il n’y a rien cette année. À cause des municipales, ou une raison à la noix dans ce genre-là ». Je m’étrangle : comment ça ! Pas de manif nationale cette année, même pas une toute petite !??
La presse m’apprend, quand à elle, qu’à l’occasion de la journée de LA femme (au singulier, comme s’il n’y avait qu’une seule façon d’être femme), je peux bénéficier d’un maquillage gratuit [1] et d’autres offres commerciales terriblement superficielles, qui me cantonnent aux rayons soins, fringues et cosmétiques (comme c’est épanouissant !). En plein règne du bling-bling sarkozien, la femme est pouffe ou n’est pas.
« Je crois que, sur certains points, nous sommes revenus très en arrière. Ce que j’appelle les 3 S de la féminité militante : suavité, séduction, soumission, sont revenus en force. Au nom de cette « féminité », notre époque a créé de nouvelles icônes qui ressemblent, à s’y méprendre, à des prostituées. Cela sème la confusion dans l’esprit des femmes, et risque bien d’effacer les progrès des trente dernières années. » [2]
Délaissez la pouffe-attitude et édifiez-vous au coin du feu
Je vais plutôt éviter de sortir cette année. Boycotter cette dé(sin)formation commerciale. Mieux vaut rester chez soi, bien au chaud, et partir, via Internet, à la recherche des femmes, des vraies, de celles qui font avancer leur temps.
- Pour commencer, j’avais très envie de retrouver le chaleureux bouillonnement (et les trolls mémorables, ouhlala) du forum des Chiennes de garde, fabuleux espace d’expression et de décompression, mais... où est-il donc passé !? Le site a changé et je ne m’y retrouve plus. Quel espace de discussion me recommandez-vous ?
- Je reprends un abonnement à Clara magazine : mais comment ai-je pu rester si longtemps privée de cet excellent petit magazine d’information, aussi succinct que vivifiant !?
- J’entame la lecture de La femme digitale, enquête sur notre époque marquée par la révolution numérique, à travers plusieurs témoignages de femmes (d’Isabelle Juppé, aux éditions JC Lattès, janvier 2008). J’ai peur que ce soit un peu mièvre, mais mais ne boudons pas cette occasion d’entendre des voix de femmes, dans ce monde d’hommes et de machines. Au pire, ce sera un bon livre à offrir, pas trop décoiffant. Lire aussi ce petit billet, Journée des Miss !, sur les Miss et les TIC.
- Les vraies féministes (re)liront plutôt le passionnant Histoire de vivre, Mémoires d’une féministe, d’Anne Zelensky-Tristan, Calmann-Lévy, 2005.
- Offrez ce petit guide : Les femmes qui ont fait l’histoire, (de Sabine Delobel, éditions Oskar, 2007 - 3 euros), ou redécouvrez-les en ligne.
- Dans l’iPod, je ré-écoute Cool Frénésie avec délices. Pour vos oreilles, il a aussi quelques perles sonores à glaner, dont les Femmouzes T et une nouvelle émission à découvrir : Radio insoumis-es.
- Enfin, cette année, c’est le Centenaire Simone de Beauvoir. Ça aussi, on l’oublierait presque. Et pourtant ! Rappelons-nous au moins la fameuse citation dans son entier :
« On ne naît pas femme : on le devient… C’est l’ensemble de la civilisation qui élabore ce produit intermédiaire entre le mâle et le castrat qu’on qualifie de féminin. »
Sur ce, je vous souhaite une excellente journée à bouquiner et surfer au coin du feu. Prenez VRAIMENT soin de vous : délaissez le maquillage bling-bling et édifiez-vous !
Vos commentaires
1. Le 8 mars 2008 à 13:34, par Mathilde
En réponse à : 8 mars 2008 : rien
Tu confirmes l’impression que j’en avais. Je cherche depuis ce matin des infos sur des manifs, des évènenements, des rassemblements ... je ne trouve rien. Rien, sauf des articles sur des blogs qui s’élèvent contre les odieuses récupérations commerciales et actions à l’antithèse de ce que doit être cette journée...
C’est triste.
2. Le 11 mars 2008 à 13:24, par Stéphane Deschamps
En réponse à : 8 mars 2008 : rien
La femme est pouffe, la femme est pouffe...
Comme tu y vas.
Le taquin en moi te rétorquerait bien que l’homme est coussin péteur, mais ce serait céder à la facilité du bon mot.
Blague à part, je continue à me demander pourquoi il faut une journée de la femme.
(PS : c’est une blague journeedelafemme.com, non ? Loin de moi l’idée de jeter publiquement l’opprobe, mais là ils abusent)
3. Le 11 mars 2008 à 13:25, par Stéphane Deschamps
En réponse à : 8 mars 2008 : rien
(post-scriptum 1 : après vérification dans la source, journeedelafemme.com est un joli site fait avec FrontPage. Sans commentaire)
(post-scriptum 2 : les abréviations automatiques sont toujours aussi difficiles à circonvenir, et mon commentaire précédent en a fait les frais : un P, un S, un parti socialiste)
4. Le 11 mars 2008 à 14:44, par Romy Têtue
En réponse à : 8 mars 2008 : rien
La « Journée de LA femme » me choque beaucoup. C’est l’appellation des pubeux ignares ou des braves gens qui croient par là vénérer quelque chose de cet « éternel féminin »...
Il s’agit en réalité d’une journée internationale de lutte pour le droit des femmes à l’égalité, instituée par les Nations Unies en 1977. Voir les explications en ligne, et la présentation du thème de cette année : « Investir dans les femmes et les filles ».
Alors bon. Les patrons qui offrent un nécessaire à manucure ou un dessous de plat à leur personnel féminin, les instituts qui offrent des soins cosmétiques et les institutions des fleurs sont un peu hors sujet, limite insultants. C’est un peu comme si on se mettait à offrir des trousses à pharmacie et des boîtes à pilules aux séropos chaque 1er décembre (journée mondiale de lutte contre le virus du Sida)...
PS 1 : journeedelafemme.com : nan, c’est pas une blague, ça semble aussi sincère que laborieux :-P
PS 2 : c’est corrigé ;-)
5. Le 11 mars 2008 à 23:00, par Stéphane Deschamps
En réponse à : 8 mars 2008 : rien
C’est vrai que le côté ’lutte’ est bien passé à la trappe. Or il y a sans doute tellement à dire et à dénoncer encore...
Pour le PS : j’ai le souci aussi, je ne sais pas le régler d’ailleurs. Il faudrait associer un article avec un champ sémantique pour que les abréviations s’y rapportent de façon plus pertinente. On va dire qu’on ne verra pas ça de notre vivant et basta !
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